13 août 2015

Main-d'oeuvre et travailleurs du savoir en déclin ?

Image courtoisie de Boians Cho Joo Young/freedigitalphotos.net

Cela fait des lunes qu'on annonce la fin du travail pour cause de mécanique et de technologie. Était-ce prématuré ? Et si les experts avaient raison ? Cette éventualité serait à nos portes maintenant. Y croyez-vous ?

C'est ce qu'examine Derek Thompson dans son papier "A World Without Work" paru à la une du Atlantic en août 2015.

Selon l'auteur, citant une recherche d'Oxford (ici en pdf), l'informatique (et ses corollaires) est susceptible d'arracher la moitié des emplois américains d'ici deux décennies. La recherche souligne même que, au plan mondial, 140 millions de travailleurs dit du savoir (knowledge workers) pourraient perdre leur emploi à cause d'algorithmes de plus en plus sophistiqués (voir page 19).

Des travaux que des robots peuvent réaliser : production manufacturière (-30% d'humains depuis 1970), et bientôt le transport routier et la livraison de marchandises (les drônes d'Amazon ne sont peut-être pas une utopie si lointaine...).

En fait, selon des chercheurs de l'Université de Chicago (voir ici), la lente diminution de la main-d'oeuvre est palpable depuis les années 2000 aux USA; le capital prend sa place et la robotique réalise des tâches avec plus de dextérité que celle des humains (et les promesses du Cloud Robotics sont encore plus surprenantes).

Les chercheurs estiment d'ailleurs que la moitié du déclin est attribuable à l'informatique (matérielle et logicielle). En 1964, une des plus grandes entreprises américaines valait $ 267 milliards (en dollars d'aujourd'hui) et comptait plus de 750,000 employés : AT&T. 

Le géant d'aujourd'hui (Google) en vaut près de $370 milliards mais emploie 55,000 personnes, 1/10e d'AT&T à l'époque.

Ce phénomène semble annoncer la fin de la classe moyenne telle que l'envisage Tyler Cowan (voir ici). Un travailleur américain sur six (24-55 ans) est sans emploi ou hors main-d'oeuvre...

Vers un monde de loisirs ? 

On l'a déjà entendu celle-là !  Mais comment se payer des loisirs quand il n'y a pas de salaire. Sans travail ni salaire, comment trouver un but à sa vie ? Et que penser de l'estime de soi ou de son statut ?

Un retour vers une forme d'artisanat ?

Selon l'économiste Lawrence Katz, la prochaine vague d'automatisation pourrait signifier le retour de l'artisanat (un retour à l'ère pré-industrielle) mais où l'imprimante 3-D, par exemple, pourrait y jouer un rôle important. On le voit déjà dans des lieux partagés de fabrication appelés "makerspaces" comme celui-ci à Victoria ou encore celui de la Columbus Idea Foundry.

Si la main-d'oeuvre décline à ce point, les makerspaces pourraient obtenir du soutien de l'État puisque ce type de lieu peut engendrer de l'entrepreneurship. Les maux du chômage sont nombreux et souvent désastreux, tant aux plans individuel que collectif. Quel rôle devrait jouer les gouvernements dans un tel contexte ? 

Y a-t-il un avenir sans travail ? Cela serait étonnant. Moins de travail mais plus d'activités (sociales, communautaires, etc.), c'est possible pour plusieurs catégories de travailleurs. Du moins, c'est à espérer.

Les relations publiques à l'abri ?

On pourrait croire que les actions de relations publiques ne peuvent être automatisées puisqu'il s'agit généralement de tâches non routinières. 

Rechercher, persuader, négocier, rédiger, faire preuve de jugement, comprendre un enjeu selon un contexte précis nécessitent la compréhension d'un environnement complexe. D'ailleurs la  recherche d'Oxford (page 28) citée plus haut semble mettre la profession à l'abri, et même davantage que la chirurgie. 

Par contre, David G. Philips vient de publier "The Automation of Public Relations" chez Blurb. Il en parle aussi dans cette entrevue audio

Puisque plusieurs tâches de type journalistique sont déjà automatisées (voir exemples ici et ici) grâce à des programmes comme Wordsmith, il n'est pas impossible de penser que certaines tâches de relations publiques peuvent être automatisées. 

Les progrès de l'intelligence artificielle dans le traitement des données massives font déjà leurs preuves en communications sportives et financières...

Ces développements méritent d'être suivis avec beaucoup d'attention !

Merci de votre lecture !

Patrice Leroux

 
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